Cover story

Leçon de transition

Avec

Miranda Kerr

Le mannequin Miranda Kerr porte une robe Erdem et des bottes de la marque Petar Petrov

MIRANDA KERR fait un pas en arrière dans la carrière qui l’a rendue célèbre. SANJIV BHTATTACHARYA a discuté avec la supermodel, nouvellement mariée, pour en découvrir la raison.

Photographe Raf StahelinRéalisation Tracy Taylor
Cover story
Poncho Rosetta Getty ; robe Ganni ; body Wolford ; bottines The Row.

Est-ce que je crois en la magie ? » Le top modèle Miranda Kerr me demande mon avis. « Je veux dire l’énergie et la volonté, précise-t-elle. Tout ce qui compte dans la vie. »

Il est dix heures à l’hôtel Bel-Air, nous sommes assis à une table et parcourons le menu des petits déjeuners. Miranda porte une robe à fleurs et des talons Prada et son regard pétille. Elle adore parler de magie et d’énergie, ce qui tombe à point nommé en ce jour d’éclipse solaire. « Ce qui arrive dans la vie nous fait progresser. Et une fois qu’on a fini un cycle d’apprentissage, un autre débute. Et c’est bien ! Qui n’a pas envie de progresser ? »

Cela semble demander beaucoup d’effort tout ça, Miranda. Pourquoi ne pas plutôt se détendre ?

« Ah ah » Miranda rit avec calme et grâce. Gardant un œil sur les serveurs, elle me dit tout bas : « essaie, ça te fera du bien. » Elle sort de son sac personnalisé Louis Vuitton un milk-shake de protéines fait maison. « C’est un mélange lait d’amande, prunes, papaye et de plein d’autres bonnes choses. »

Miranda est restée la même qu’il y a presque deux ans lors de notre dernière rencontre. À l’époque, elle m’avait offert une soupe, du jus et du thé. Invité chez elle à Malibu, je faisais la connaissance d’une femme chaleureuse. Aujourd’hui, à l’hôtel, c’est une Miranda conviviale que je découvre. Le milk-shake n’est qu’un début, la voilà qui mélange une poudre couleur cacao avec de l’eau et m’offre un breuvage crémeux – étonnamment bon – au goût de myrtilles.

« C’est de la poudre de noni, un superaliment excellent pour la peau, m’explique-t-elle. Le noni contient plus de cent vitamines et minéraux. J’en bois depuis que j’ai treize ans. Tu peux même te faire des noninis ! »

Qu’est-ce que c’est ? Des mini-nonis ?

« Non, ce sont des nonis avec du champagne ! »

Si Miranda n’a pas changé – elle continue à donner aux journalistes ses boissons healthy – sa vie, elle, a pris un tournant radical. Elle vient d’épouser Evan Spiegel, 27 ans, de sept ans son cadet, le milliardaire de génie derrière Snapchat. Elle montre son alliance avec fierté : « il l’a choisie lui-même ». C’est en partie grâce à Spiegel qu’elle a effectué sa transition de top modèle à femme d’affaires. À présent CEO de KORA Organics – sa marque beauté – Miranda n’a pas pris que ses sachets de noni. Elle partage avec moi le fruit d’années de travail décliné à travers sa ligne de produits beauté et bien-être.

« Evan m’inspire, me dit-elle. Un jour il m’a demandé pourquoi je dépensais tant d’énergie à bosser pour d’autres quand je pouvais le faire pour moi-même. Il m’a conseillé de prendre le risque de croire en ce que je fais et de m’y consacrer pleinement. »

Et Evan avait raison. En plus de diriger sa propre entreprise et sa carrière de mannequin, Miranda a imaginé des jeans pour Mother, des bijoux pour Swarovski et des théières pour Royal Albert. Elle a depuis arrêté de travailler avec Swarovski et Mother, défile beaucoup moins et dessine des sacs pour le label japonais Samantha Thavasa.

« Je suis mannequin depuis vingt ans, ce n’est plus ma priorité. Dès que j’ai une opportunité, je me demande toujours si c’est bien pour ma famille et quel impact ça aura sur Kora. Si ça correspond à ces critères ou qu’un shooting a lieu à L.A., d’accord… » Mais des exceptions existent ; elle était récemment à New York avec le photographe Steven Meisel car « c’est un génie de la création. »

Robe Goen J ; haut Bottega Veneta ; boucles d’oreilles Simon Miller.
Robe Acne Studios ; body Wolford ; boucles d’oreilles Simon Miller.
Robe Acne Studios ; body Wolford ; bottes Jil Sander ; boucles d’oreilles Simon Miller.

Miranda a lancé Kora Organics en 2006. Après trois ans de recherches et développement avec un chimiste organique et un aromathérapiste. D’abord lancée en Australie où elle compte désormais plus de 400 boutiques, la marque a débarqué aux États-Unis, chez Sephora, en mai 2016, juste avant son mariage avec Spiegel. La gamme a mis longtemps à s’implanter là-bas car ouvrir un nouveau marché a un coût et que Miranda reste à ce jour le seul investisseur.

Avec Kora, Miranda n’a pas créé qu’un business. Elle s’est donnée pour mission d’offrir bien-être et positivité aux gens. Chrétienne fervente avec un twist New Age, elle affiche une spiritualité syncrétique typique de la Californie, où elle et sa famille ont élu domicile. « Cleansing » et « vibration » font partie de son vocabulaire courant, tout comme ces mots que je n’ai jamais entendus comme « noni » et « ylang-ylang ». Miranda est passionnée, elle ramène la conversation à son « bébé » dès qu’elle a une chance.

Voici ce qu’elle veut que vous sachiez sur sa marque : chaque produit est organique et fait avec du noni, filtré à travers des cristaux de quartz rose « pour leur donner des vibrations positives ». Le quartz est ensuite rincé avec de l’eau salée et « ré-énergisée » au soleil avant d’être utilisé. Les mots « bonheur » et « lumière » figurent en belle place sur le packaging, au côté de la mention « créé avec amour par Miranda Kerr. »

« Pour moi, les mots ont le pouvoir d’encourager », m’explique-t-elle. « La société peut être si négative qu’il est bon de prendre un moment de pensée positive et de s’élever – choisir ses pensées pour choisir sa réalité. »

Miranda a toujours été positive. Élevée dans un foyer modeste et aimant dans la campagne australienne, son ascension dans le monde du mannequinat relève du conte de fées. Découverte à treize ans, elle obtient son premier contrat avec Victoria’s Secret à 23 ans et épouse une star hollywoodienne à 27 ans. Mais tout n’a pas toujours été aussi idyllique. La mort de son premier amour, Christopher Middlebrook, alors qu’ils sont tous les deux adolescents et son divorce avec l’acteur Orlando Bloom – Flynn, son fils, n’était alors âgé que de deux ans – la plongent dans la dépression. « Divorcer était la meilleure chose à faire. On ne s’apportait rien de bénéfique, confie-t-elle. Mais il n’y a pas d’animosité entre nous, nous serons toujours amis. »

Robe Protagonist ; body Wolford ; bottines The Row.
Veste et robe Loewe.

L’envie d’inspirer l’habite. Ses livres Empower Yourself et Treasure Yourself dédiés aux jeunes femmes d’aujourd’hui en témoignent. Elle est heureuse avec Evan Spiegel qu’elle décrit comme un « jeune vieux » déterminé (« un homme de 50 ans dans un corps de jeune mec ») avec un emploi du temps on ne peut plus strict. « Je crois que suis plus spontanée que lui, avoue-t-elle. J’ai tendance à laisser couler alors que lui a besoin de tout planifier. »

Mais Miranda est aussi casanière. Chaque matin, après une cure de cleansing avec de l’eau chaude et du vinaigre de cidre, elle fait du yoga ou des exercices de pilates avec une app ou un personal trainer. Elle conduit ensuite Flynn à son école à Santa Monica et s’arrête dans les bureaux de Kora où elle supervise une équipe de dix personnes. À la fin de la journée, elle rentre chez elle cuisiner pour sa famille. « Ma grand-mère m’a appris que les hommes étaient très visuels, donc il faut toujours faire un petit effort pour eux. Quand Evan rentre, je fais toujours attention à avoir une belle robe et des bougies allumées pour prendre le temps de dîner ensemble. »

Le week-end, Evan et Miranda invitent leurs amis autour d’un barbecue. Pour le 4 juillet cette année, ils ont organisé une vraie fête avec des piscines gonflables et toboggans. Ils peuvent tous les deux compter sur des amis de longue date. À leur mariage, il y avait une quarantaine d’invités, parmi lesquels la chanteuse country Colbie Caillat qui a interprété Never Gonna Let You Down, que Miranda chante pour moi. « Nous aimons danser, mais à la maison. J’ai besoin de choisir la musique. »

À quel moment est-elle la plus heureuse ? « Quand je suis avec mon fils et mon mari. Il y a deux jours, on revenait de l’aéroport et j’étais entre Flynn et Evan, on chantait comme des fous en se tenant les mains. »

Et quand son mari et son fils ne sont pas là, elle adore aller au spa pour un massage ou un sauna infrarouge. « Je ne culpabilise jamais lorsque je dépense pour mon bien-être », révèle-t-elle. C’est ce qui explique pourquoi une fois elle s’est retrouvée avec une sangsue mordillant chacune de ses oreilles. Elle a parlé de cette expérience à l’occasion d’une conférence avec Gwyneth Paltrow où elles discutaient de traitements bizarres (même si elle n’en est pas encore aux œufs de jade glissés dans le vagin comme Gwyneth). « Vous pouvez sentir leurs petites dents », dit-elle avec un sourire.

« Oui, c’est fou, mais je revois la femme qui fait ce traitement après notre petit déjeuner. Elle propose aussi un traitement par pierres magnétiques. » Ça consiste à placer de minéraux sur le corps pendant une quinzaine de minutes – beaucoup moins bizarroïde que les petites bêtes.

« C’est super, je fais juste une sieste. Ça me plonge dans un état de méditation profond. Après je me sens en pleine forme. Tu sais quoi ? C’est comme un bon verre de jus de noni ». Elle me fait un clin d’œil et me dit : « c’est magique ! »

Robe Gabriela Hearst ; body Wolford ; bottes Jil Sander.

Les personnes mentionnées dans cet article ne sont pas associées à NET-A-PORTER et n’en assurent pas la promotion, ni celle des produits présentés.