Modern love
Avec
Daisy Edgar-Jones

Elle est l’actrice dont tout le monde parle suite à sa performance dans l’adaptation de la BBC du roman de Sally Rooney Normal People (une histoire d’amour moderne qui a captivé l’audience). Quel sera le prochain chapitre pour la star so British DAISY EDGAR-JONES ? KATIE BERRINGTON a discuté avec elle sur Zoom de confinement et de célébrité.
En l’espace de quelques semaines seulement, la jeune actrice de 22 ans Daisy Edgar-Jones a été catapultée sur le devant de la scène publique après qu’on l’ait découverte dans l’adaptation télévisée du roman de Sally Rooney, Normal People. Nous discutons sur Zoom (elle est en direct depuis sa chambre, dans la maison qu’elle partage à Londres avec 3 amis) et elle me confie qu’elle n’avait aucune idée du succès que la série allait rencontrer.
« Je suis si cynique que je pensais que personne n’allait la voir ! », s’exclame-t-elle. Bien que, pendant le tournage en Irlande, les acteurs et l’équipe étaient convaincus de participer à un projet spécial, Daisy affirme qu’elle « ne s’attendait pas à ce que la série soit si bien reçue, et que tant de personnes la regardent. »
« Tout le monde a assuré. L’équipe était incroyable, mais Lenny [Abrahamson, l’un des réalisateurs] a dit “Même si vous travaillez avec les meilleurs sur un projet génial, il se peut que personne n’en ait rien à faire.” Donc j’espérais juste que ma famille et mes amis apprécient, mais je ne voyais pas plus loin que ce cercle. »
La série de la BBC3 en 12 épisodes, qui raconte l’histoire d’amour entre Connell et Marianne, deux étudiants, du Comté de Sligo jusqu’au Trinity College de Dublin, a récolté les louanges des critiques et rencontré le plus de succès en streaming. Entre son histoire émouvante et la performance de Daisy et de Paul Mescal, elle s’est avérée à la hauteur des attentes que le public avait avant son lancement.
Le phénomène est encore plus surprenant en cette période de pandémie, et l’actrice ne réalise pas tout à fait. « Tout est sur mon portable donc ça me semble irréel. J’éteins mon téléphone et rien n’a vraiment changé. C’est difficile de se rendre compte de l’impact réel… Nous n’arrivons pas à y croire. »
« Je me sens chanceuse d’avoir rencontré Paul. C’est une personne merveilleuse, et un acteur très généreux », dit-elle de son partenaire à l’écran. « Il restera un ami pour la vie. »
L’expérience était impressionnante pour tous les deux (c’était le premier projet de Paul et le premier rôle principal de Daisy), mais leur alchimie leur a rendu les choses plus faciles. « On devenait hystériques, en général vers 5 heures », se souvient-elle. « À chaque scène émouvante ou intense, on avait un fou rire ensuite. »
« J’aime le fait que l’on puisse s’exprimer à ce point avec des vêtements »
Les fans de la série sont nombreux en ligne, et pas n’importe lesquels. « Je crois que Kourtney Kardashian en a parlé aujourd’hui ! », dit-elle en riant, incrédule. Mais loin des tapis rouges, l’actrice donne des interviews depuis son lit et a même participé au Late Show de James Corden et à une story Instagram de Kaia Gerber.
« C’était fun et génial d’avoir des projets qui jalonnaient ma semaine, mais en même temps très stressant de trouver le bon angle, la bonne lumière et de m’habiller avec le contenu de mon dressing, majoritairement teinté de gris », commente-telle en désignant l’arrière-plan. « Je veux que tout soit toujours parfait. »
Cela inclut ses choix vestimentaires, y compris pour les interviews sur Zoom. « J’adore les grands cols et les manches originales. »
« J’aime le fait que l’on puisse s’exprimer à ce point avec des vêtements. Du genre, c’est cela que je veux être aujourd’hui. » En février dernier, Daisy a assisté à sa première Fashion Week à Londres, où elle a même eu sa place au front row du défilé Roland Mouret.
Même si elle a encore la candeur de celle qui vient de débuter dans l’industrie, elle en comprend tout de même les rouages. Et bien qu’elle soit déjà apparue dans de nombreux drames (dont Cold Feet, Affaires non classées, Gentleman Jack et La Guerre des mondes), Marianne est le rôle qui lui a offert une renommée internationale. Elle a aussi foulé la scène, avec notamment un rôle dans la pièce Albion au théâtre Almeida, qui s’est terminée juste avant le confinement.
Si le contexte ne lui a pas permis de bénéficier du soutien dont elle aurait normalement pu bénéficier, elle semble pourtant parfaitement gérer sa nouvelle renommée.
« Je crois fermement en la mentalité “fake it until you make it”. Vous savez, vous êtes sur Zoom et vous vous la jouez cool, mais dans votre tête vous êtes dans cet état [elle fait une grimace exagérée]. J’ai une forte tendance à m’auto-saboter, où mon cerveau se dit “Et si tout à coup je… [elle mime une porte qui claque] ”? », dit-elle en riant.
En revanche, elle n’a pas manqué de célébrer le succès de la série avec sa famille et le reste du casting. « On a fait une soirée sur Zoom. Ça aurait été fun d’aller à des projections et tout, mais ce qui me manque le plus, c’est de fêter cela avec ma mère, mon père et mes amis… Je suis amie avec tous les acteurs, j’ai juste envie de crier et de danser avec eux, parce que c’est juste dingue ! »
Ses parents l’ont toujours soutenue, et lui ont permis de « poursuivre une carrière qu’elle aime et ne l’ont pas poussée à aller à l’université. » La carrière de ses parents (son père est directeur de Sky Arts et l’un des fondateurs de Big Brothers, sa mère est monteuse pour le cinéma) lui a appris des leçons importantes.
« Mon père sait comment gérer la célébrité. Quand je tournais Normal People, les gens me disaient “Le livre est populaire Daisy, vous allez avoir beaucoup de public”, et moi je répondais “Meuh non” », dit-elle en riant. « Mon père m’a tenu le genre de discours qui est fait aux participants de Big Brother sur la célébrité. Il a été très bon, à me dire : “Garde la tête sur les épaules, les pieds sur terre, ne te laisse pas embarquer, tu es toujours la même personne, tu n’as pas changé, même si les gens autour de toi, si.” »
C’est la force et la complexité de Marianne qui ont donné à Daisy l’envie de jouer dans Normal People. « J’ai aimé Marianne dès les premières pages. C’est grisant d’incarner une femme qui a tant de défauts et qui est si compliquée, et qui ne reste pas là à glousser à chaque fois que son petit copain ouvre la bouche. Elle a un fort caractère et porte différents masques au fur et à mesure. »
« Je ne me suis jamais sentie aussi proche de mes voisins et des gens autour de moi, parce qu’on fait tous quelque chose d’important : nous restons chez nous et protégeons le NHS »
Elle a aussi remarqué l’égalité entre les personnages, et comment les dynamiques changent au cours de la série. « Il y a cette idée que Marianne sait ce qu’elle fait et qu’elle domine souvent Connell, qu’elle a le pouvoir. Mais en ce qui concerne l’intimité, sa force vient de la façon dont elle assume d’être vulnérable. C’était un aspect passionnant à explorer. »
Leur alchimie à l’écran et les scènes de sexe réalistes font partie des ingrédients qui ont fait le succès de la série. Ita O’Brian était responsable de mettre en scène les moments d’intimité. Appartenant à une génération qui a vu naître des mouvements mettant en lumière la situation des femmes dans l’industrie, Daisy est étonnée que ça n’ait pas toujours été la norme.
« Il faut plus de protection parce que c’est tellement éprouvant. Vous devez faire des manœuvres physiques qui doivent avoir l’air réelles, comme pour une scène de combat », explique-t-elle. « Mentalement, on se sent vulnérable. Vous devez vous sentir en contrôle dans ces moments-là, pour pouvoir vous détendre et offrir une meilleure performance. Sans Ita, ces scènes n’auraient pas été si passionnées. Paul et moi pouvions toujours parler si on voulait. »
Quand elle se tourne vers le futur, l’actrice a remarqué un changement positif dans les scénarios qu’elle reçoit. « Il y a de plus en plus de jeunes personnages qui sont traités avec maturité. Par le passé, les amours adolescentes étaient toujours légères. De nos jours, les personnages sont plus profonds et matures, la situation n’est pas prise à la légère quand vous avez le cœur brisé pour la première fois. »
Après le tourbillon 2019 (« J’adore être si occupée que je n’ai rien d’autre à penser, je suis un peu accro au travail »), ses plans pour 2020 ont évidemment pris une autre tournure. Mais l’optimiste Daisy a trouvé des points positifs au confinement. Elle a appris à vivre dans l’instant, à déconnecter et à se rapprocher de sa communauté.
« À Londres, vous êtes anonyme, les gens passent à côté de vous sans vous voir. Je ne me suis jamais sentie aussi proche de mes voisins et des gens autour de moi, parce qu’on fait tous quelque chose d’important : nous restons chez nous et protégeons le NHS » (système de santé anglais, NDLR).
Plutôt que de repenser avec nostalgie à la vie d’avant le confinement, Daisy Edgar-Jones reste fidèle à elle-même et voit le bon côté des choses. « C’est ma première tournée de promotion et c’est différent de faire ça depuis chez vous. Je peux me faire une petite tasse de thé », dit-elle en souriant. « C’est probablement une bonne façon de s’habituer, au moins je sais comment jouer avec les éclairages. » Une étoile est née.