Drôle de fille
Avec
Anna Kendrick

Actrice, chanteuse, star de Twitter et auteure, ANNA KENDRICK vit à fond. Elle se confie à JENNIFER DICKINSON sur ses projets de super-héroïne et sa relation complexe avec ses fans.
Un de ces bus à impériale typiquement londonien s’arrête en plein trafic et une horde de fans laisse s’échapper un « Oh mon Dieu ! Regardez, c’est Anna ! » collectif, forçant la jeune femme en face de moi à se cacher derrière son imposante chevelure. À la porte, un agent de sécurité regarde la foule en émoi, prêt à intervenir.
Le feu passe au vert, le bus continue sa route, me voilà soulagée. Ce groupe n’était pas menaçant, mais la gêne d’Anna Kendrick avait quelque chose de troublant. Elle est l’une des actrices les plus populaires de sa génération (un rôle dans la série des Twilight, une nomination aux Oscars pour In the Air, un premier rôle dans le blockbuster Pitch Perfect…), mais la trentenaire ne fait pas ce métier pour attirer l’attention.
« Je ne me suis jamais dit que ce serait extraordinaire de n’être entourée que de célébrités. Rien de surprenant à ce que je sois complètement pétrifiée lorsque je dois me rendre à une cérémonie ou un truc dans le genre… »
N’y voyez là aucune fausse modestie. Si jouer est pour elle tout à fait naturel, faire des manières, aller à la pêche aux compliments ou poser dans une robe de créateur l’est beaucoup moins. Il y a des fans avec qui ça se passe très bien : « Les ados sont hyper contents de me voir, c’est adorable. Les femmes de 25 à 35 ans sont nettement plus bruyantes, ce qui a tendance à me rendre un peu nerveuse. »
“J’en étais arrivée à me dire ‘ma vie est en train de m’échapper, je dois me ressaisir”
Twilight l’a en effet révélée à un public de fans plus jeunes, tandis que Pitch Perfect, avec ses histoires de filles drôles et son côté geek, a emballé toute la gent féminine. Et c’est sans compter ses projets moins commerciaux : Anna, en vraie boulimique de travail, a plus d’un tour dans son sac. Depuis 2009, l’actrice a tourné environ cinq films par an. Je lui demande s’il lui arrive de dire non. « J’en étais arrivée à un point où je me disais : “Ma vie est en train de m’échapper, je dois me ressaisir” », avoue-t-elle. Suite au changement des dates du tournage de Pitch Perfect 3, celle qui se passe volontiers de vacances a été forcée d’en prendre : « La terre ne s’étant pas arrêtée de tourner, j’ai compris que je pouvais lever le pied. »
“Je ne pourrais pas être comme Taylor Swift, l’américaine parfaite qui donne beaucoup à ses fans”
Mais pour Anna, les « vacances » ne signifient pas nécessairement plage et farniente : elle a profité des siennes pour écrire un livre. « J’étais fière de faire quelque chose d’aussi personnel. Mon éditeur répétait sans cesse : “C’est ton livre, fais ce que tu veux.”, et moi de lui dire : “Mais tu ne pourrais pas me dire comment m’y prendre ?” »
L’idée du livre Litte Scrappy Nobody est directement liée à l’enthousiasme suscité par son compte Twitter. Le style y est plutôt cinglant et on retrouve son ton sarcastique inimitable. Il faudra néanmoins attendre le mois de novembre pour découvrir comment tout l’humour de ses tweets s’accommode de ce nouveau challenge littéraire. Une chose dont on peut d’ores et déjà attester est son talent comique ; il fallait la voir lors du shooting pour The EDIT à New York, et ce malgré un gros rhume. Elle le dit elle-même, elle ne peut pas s’en empêcher. « Si je devais jouer Madame Bovary, il y aurait toujours un moment où mon cynisme referait surface. Parfois, les gens me disent : “Allez tu nous le fais ? Tu sais, ce truc que tu fais.” Cela peut parfois m’énerver. Mais, dans l’absolu, je suis contente que ce soit l’image que je dégage. Au moins, lorsque je suis cassante avec les gens, ils savent que c’est ma façon d’être. Je ne pourrais pas être comme Taylor Swift, la petite américaine parfaite qui donne beaucoup à ses fans et qui est là pour leur faire passer un moment inoubliable. Enfin, je ne veux pas non plus plomber la journée des gens que je croise, mais je suis ravie de savoir que je peux dire des choses un peu étranges, ils savent comment je suis. »
“Tout le monde évolue entre la confiance en soi et l’obsession de ce que les autres peuvent penser”
Son dernier film, Incouchables, est un autre florilège de répliques acérées. Anna admet elle-même qu’il est très drôle et on peut la croire car son honnêteté et son sens critique ne la rendent pas bon public. Avez-vous déjà entendu une actrice dire qu’elle se souciait de l’opinion des autres ou qu’elle n’avait pas bien compris un film dans lequel elle jouait ? Et bien, c’est chose faite. « Tout le monde évolue entre la confiance en soi et l’obsession de ce que les autres peuvent penser », explique-t-elle. « J’ai joué dans Scott Pilgrim parce que j’adorais le travail d’Edgar Wright le réalisateur. Je n’ai rien compris au script et j’étais complètement perdue sur le tournage ! Mais j’étais certaine que ce serait au même niveau que ses autres productions et j’ai eu raison. »
Dans Incouchables, Aubrey Plaza, qu’elle côtoie dans la vraie vie, joue sa meilleure amie. Ce duo de fêtardes entend profiter de vacances gratuites à Hawaii en accompagnant Mike (Adam Devine) et Dave (Zac Efron), deux frères qui comptent sur elles pour rester dans le droit chemin à l’occasion du mariage de leur sœur. Que le réalisateur Jake Szymanski ait fait ses débuts sur le site internet comique Funny or Die, devrait nous indiquer à quoi nous attendre. Anna raconte : « On a tellement improvisé pendant le tournage que lorsque j’ai vu le film, il y avait 15 % des blagues dont je me souvenais plus ! »
L’équipe au grand complet a posé ses valises à Hawaii pendant la durée du projet, un vrai luxe. Anna était un peu la maman de la bande. « Je ne cessais de répéter : “Vous avez mis votre crème solaire ?” J’avais même une application pour localiser les requins. Zac est une tête brûlée si bien que j’avais peur qu’il meure avant la fin du tournage. Un jour, il s’était mis en tête de sauter depuis les falaises, s’élançant de plus en plus haut. J’ai dû le supplier d’arrêter. »
Outre ses prouesses de cascadeur, Zac est une bonne personne, révèle Anna. « Adam, c’est le rigolo de service et Zac le mec sincère, gentil, serviable et généreux, super bon pour jouer l’idiot à l’écran. » Quand elle déclare ne pas pouvoir être franche au sujet de toutes les personnes avec qui elle travaille, on sait au moins qu’elle ne parle pas de lui. « Je suis surprise de ne pas avoir ruiné mon karma », dit-elle quant à sa liberté de ton lorsqu’elle est en promo. Certaines personnes ont mauvaise réputation, j’ai envie de secouer les gens, de leur dire : “Non, celles-là sont vraiment bien.” D’autres ont une bonne image, mais sont en réalité des ordures de tout premier ordre. Mais ça, bien entendu, je ne peux vraiment pas le dire. »
“Certains acteurs ont une bonne image mais sont en réalité des ordures de premier ordre !”
Autre partenaire (dans The Voices en 2014) qu’elle apprécie particulièrement, Ryan Reynolds, qu’elle décrit comme « une des personnes les plus authentiques avec qui j’ai pu travailler ». « Il mérite son succès dans Deadpool. Il a bossé tellement d’années pour faire ce film et révéler ce personnage qui était en lui. »
Pourrait-elle se glisser à son tour dans le costume moulant d’une super-héroïne ? « Mon frère m’a envoyé la bande dessinée Squirrel Girl. À part être à moitié écureuil, je ne sais pas trop ce qu’elle fait, mais j’imagine que je pourrais jouer le rongeur ». Évidemment, et aussi tous les rôles du monde.
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