L'art du style

Lydia Pang : 5 créations que je n’oublierai jamais

Lydia Pang (gauche), le jour de son mariage, ici aux côtés de sa sœur, Millie.

La directrice artistique de Nike, née au pays de Galles et d’origine chinoise, vous dévoile les pièces qui ont influencé sa vie et sa carrière, de sa robe de mariée noire à ses souliers à plate-forme.

Mode

Lorsque j’étais enfant, ma sœur, Millie, était gravement malade et passait beaucoup de temps à l’hôpital. Ce fut une période déterminante qui a façonné la personne que je suis aujourd’hui. Pendant ces années difficiles, ma mère s’est tournée vers la mode pour trouver un semblant de réconfort : elle expérimentait avec son style et n’avait jamais eu autant d’assurance. Le chagrin causé par cette épreuve l’a poussée à chercher un sentiment de contrôle, et les vêtements lui permettaient de s’exprimer et de se protéger. La mode est devenue son armure.

Aujourd’hui, ma sœur est en très bonne santé. Elle est médecin et recherche actuellement un traitement qui soignera le Covid-19. Le confinement mis en place aux États-Unis à cause de la pandémie m’a permis de remettre plusieurs choses en perspectives. J’étais surprise de voir que l’une d’entre elles est l’importance que j’accorde au style. De même que pour ma mère, la mode fait partie de moi.

J’étais la seule femme de couleur à passer cet entretien pour un travail destiné habituellement à un homme blanc, porter un pantalon d’homme semblait donc un choix parfait

J’ai un look très distinct, vous pourriez appeler ça un uniforme. J’aime les silhouettes architecturales, les tailleurs, les détails originaux et les touches dramatiques, mais surtout, le noir et le blanc. Mon style a notamment été influencé par des pièces que je considère comme les piliers de mon look. Une chose est sûre, lorsque je sais que je ne dois pas sortir de chez moi (comme c’est le cas en ce moment), ces essentiels boostent mon moral.

La mode est-elle une distraction en ces temps difficiles ? Ou nous permet-elle de nous protéger ? Le fait de choisir mes habits libère ma créativité et me permet de me sentir moi-même pendant cette période instable. Voici certaines des pièces qui ont défini les moments importants de ma vie :

Mon pantalon pour homme Comme Des Garçons

C’était un coup de foudre. Je ne le quittais plus, bien qu’il soit beaucoup trop grand ; je l’ai d’ailleurs porté lors de mon premier entretien pour une grande agence publicitaire. J’adorais la sensation d’assurance qu’il me procurait. Je dénotais complètement, mais je ne me suis jamais sentie aussi forte. J’étais la seule femme de couleur à passer cet entretien pour un travail destiné habituellement à un homme blanc, porter un pantalon d’homme semblait donc un choix parfait.

Mes creepers à plate-forme

J’ai eu du mal à trouver ma place pendant mes premières années dans la publicité. Je n’avais pas l’impression d’appartenir à un groupe et ce manque de clarté a affecté ma carrière. Ma présence, mes idées, ma voix forte et le bruit que faisaient mes creepers lorsque je rentrais dans une pièce faisaient de moi une femme intimidante. C’est sur cette image que j’ai bâti ma carrière. J’adorais porter des tenues au cordeau avec ces chaussures imposantes : c’était un look sophistiqué avec une touche de punk.

Dans son pantalon masculin Comme des Garçons.

Mon tailleur Acne

Il est important pour moi d’investir dans des pièces d’exception. Je n’achète pas souvent un nouveau vêtement car je sais que je le porterai des années durant. Ce deux-pièces m’a accompagné à des dîners, des rendez-vous amoureux, des journées shopping et de nombreuses autres occasions (dont mon dernier entretien pour Nike). Certaines pièces deviennent des incontournables : une touche de rouge à lèvres ou une paire de chaussures différente suffisent à leur offrir une seconde jeunesse.

Dans son ensemble Acne Studios.
Lydia et son mari, le designer Roo Williams, le jour de leur mariage au Pays de Galles.

Ma robe de mariée noire

Je ne m’étais jamais autant sentie moi-même. J’avais associé cette robe faite sur-mesure et à la main par Katie Roberts-Wood à des bottes Tabi de Maison Margiela. Je trépignais d’impatience à l’idée de la porter. J’étais à l’aise, charismatique, gothique mais féminine et moderne à la fois. Il était primordial pour moi de travailler avec une jeune créatrice qui utilisait des techniques uniques et conjuguait force et féminité. C’est décidé, c’est la robe que je porterai lors de mes funérailles.

Mon ensemble en cachemire

Cela fait trois jours d’affilée que je le porte… Que ce soit lors d’une vidéoconférence, d’un arrêt rapide au supermarché sans soutien-gorge ou lorsque je dévore un bol de nouilles instantanées, il apporte une touche de sophistication à mes activités quotidiennes. Grâce à lui, je ne vois aucun inconvénient à ne pas quitter la maison.